Il paraît que nous sommes entrés dans l’ère
de l’information. Et il est vrai que de nombreux indices
peuvent nous le faire croire. Avec le câble ou le satellite,
nous disposons de plusieurs chaînes exclusivement
réservées à l’information, qu’elle
soit généraliste, sportive ou people. Les
automobilistes connaissent tous France Info. Et puis, bien entendu,
Internet, la plus grande base de données du monde est
là pour répondre à toutes nos questions.
Ainsi, nous savons tous que l’économie va mal, que les
sociétés dans les nouvelles technologies sont au bord
du gouffre, que celles de l’économie classique ne se
portent pas bien et que les sociétés françaises
d’assurance viennent de passer quelques très mauvaises
années qui les obligent à augmenter leurs primes
d’assurances pour couvrir les remboursements importants
auxquels elles ont dû faire face.
Il fut un temps où ces informations ne nous seraient
parvenues qu’avec retard, et peut-être même avec un
recul qui en aurait modifié la portée. Alors
qu’aujourd’hui, tout le monde est informé avec la
célérité extrême de notre
société de l’information.
L’opacité de ce qui se passait a disparu. Mais
sommes-nous mieux informés ?
Je me le demande, et j’ai plutôt l’impression que
l’écran de fumée a remplacé
l’opacité, et qu’en fait de transparence, nous
nous retrouvons avec des miroirs déformants qui travestissent
la réalité. Parfois, ce sont les
intéressés qui distillent de fausses informations, et
parfois ce sont leurs ennemis. Les journalistes sont également
tantôt des acteurs de la mascarade, tantôt des victimes.
Et plus que jamais, nous devons appliquer notre esprit critique
à l’information et ne pas l’absorber telle
qu’elle nous est présentée comme une
éponge inintelligente ou, pire, la redistribuer telle quelle
sans plus de jugement qu’un psittacidé.
Ainsi, France Télécom au bord du gouffre est en fait
bénéficiaire de façon presque
éhontée, tout au moins pour ce qui concerne
l’exploitation. En d’autres termes, nous payons
très cher le téléphone pour compenser les
conneries faites dans les investissements.
L’économie classique ne se porte pas si mal que
ça, et si les établissements ferment, c’est plus
parce qu’il est plus intéressant de les ouvrir ailleurs
qu’en France. Et ce n’est malheureusement pas fini, car
nous sommes loin du compte.
Quoiqu’il en soit, pour diminuer la pression sociale, personne
n’a intérêt à ce que l’on crie trop
fort que les établissements des entreprises qui ferment font
des bénéfices.
Les sociétés d’assurance, malgré toute la
pression médiatique et le lobbying qu’elles ont
entrepris pour faire passer les augmentations de primes, ne se
portent pas si mal que ça. A commencer par les plus grosses
telles que les AGF dont le chiffre d’affaires 2002 est
resté constant par rapport à 2001 (source AGF), mais
dont les bénéfices seraient supérieurs de 6,54%,
un taux record (source Freelance en Europe).
Plus que jamais, l’information est devenue un bien
stratégique, et nous devons apprendre à la
considérer non plus comme une valeur en soi, mais bien comme
une donnée brute à analyser et non pas croire.
C’est peut-être à ce prix que les hoax (canulars)
qui nous arrivent régulièrement par email ne se
propageront plus aussi vite et de façon aussi explosive, et
peut être également que nous ne verrons plus passer ces
pétitions aux apparences humanitaires qui parfois recouvrent
tout autre chose, que l’auteur de la pétition soit
cyniquement manipulateur ou victime lui-même d’un
manipulateur.
© La Souris Déchaînée 14/2/2003