Anesthésie générale

Pour lancer cette rubrique qui apparaît en contrepoint de ce que peuvent nous dire (endormir) les médias, je n'ai pu résister à l'envie de vous faire profiter de la plume acérée de Mr Michel Lo, rédacteur collaborateur à FTPRESS et instigateur de la newsletter LA SOURIS DECHAINEE, tant nos humeurs concordent sur ce point :

Reproduit avec la permission de l'auteur.

Sources : le site ftpress.com
Annexe de "la souris...", le site jevousemmerde.com
Update 2006 Ces sites n'existant plus, je vous renvoie à un espace de Michel Lo, où sont archivées quelques autres de ces caustiques éditos : http://echo.levillage.org/reporter/redacteur.cbb?idauteur=2850
LA SOURIS DéCHAîNéE, Numéro 136 - 14 fevrier 2003
L'EDITO DE MICHEL LO
De l'opacité à l'écran de fumée

Il paraît que nous sommes entrés dans l’ère de l’information. Et il est vrai que de nombreux indices peuvent nous le faire croire. Avec le câble ou le satellite, nous disposons de plusieurs chaînes exclusivement réservées à l’information, qu’elle soit généraliste, sportive ou people. Les automobilistes connaissent tous France Info. Et puis, bien entendu, Internet, la plus grande base de données du monde est là pour répondre à toutes nos questions.

Ainsi, nous savons tous que l’économie va mal, que les sociétés dans les nouvelles technologies sont au bord du gouffre, que celles de l’économie classique ne se portent pas bien et que les sociétés françaises d’assurance viennent de passer quelques très mauvaises années qui les obligent à augmenter leurs primes d’assurances pour couvrir les remboursements importants auxquels elles ont dû faire face.

Il fut un temps où ces informations ne nous seraient parvenues qu’avec retard, et peut-être même avec un recul qui en aurait modifié la portée. Alors qu’aujourd’hui, tout le monde est informé avec la célérité extrême de notre société de l’information.

L’opacité de ce qui se passait a disparu. Mais sommes-nous mieux informés ?

Je me le demande, et j’ai plutôt l’impression que l’écran de fumée a remplacé l’opacité, et qu’en fait de transparence, nous nous retrouvons avec des miroirs déformants qui travestissent la réalité. Parfois, ce sont les intéressés qui distillent de fausses informations, et parfois ce sont leurs ennemis. Les journalistes sont également tantôt des acteurs de la mascarade, tantôt des victimes. Et plus que jamais, nous devons appliquer notre esprit critique à l’information et ne pas l’absorber telle qu’elle nous est présentée comme une éponge inintelligente ou, pire, la redistribuer telle quelle sans plus de jugement qu’un psittacidé.

Ainsi, France Télécom au bord du gouffre est en fait bénéficiaire de façon presque éhontée, tout au moins pour ce qui concerne l’exploitation. En d’autres termes, nous payons très cher le téléphone pour compenser les conneries faites dans les investissements.

L’économie classique ne se porte pas si mal que ça, et si les établissements ferment, c’est plus parce qu’il est plus intéressant de les ouvrir ailleurs qu’en France. Et ce n’est malheureusement pas fini, car nous sommes loin du compte.

Quoiqu’il en soit, pour diminuer la pression sociale, personne n’a intérêt à ce que l’on crie trop fort que les établissements des entreprises qui ferment font des bénéfices.

Les sociétés d’assurance, malgré toute la pression médiatique et le lobbying qu’elles ont entrepris pour faire passer les augmentations de primes, ne se portent pas si mal que ça. A commencer par les plus grosses telles que les AGF dont le chiffre d’affaires 2002 est resté constant par rapport à 2001 (source AGF), mais dont les bénéfices seraient supérieurs de 6,54%, un taux record (source Freelance en Europe).

Plus que jamais, l’information est devenue un bien stratégique, et nous devons apprendre à la considérer non plus comme une valeur en soi, mais bien comme une donnée brute à analyser et non pas croire. C’est peut-être à ce prix que les hoax (canulars) qui nous arrivent régulièrement par email ne se propageront plus aussi vite et de façon aussi explosive, et peut être également que nous ne verrons plus passer ces pétitions aux apparences humanitaires qui parfois recouvrent tout autre chose, que l’auteur de la pétition soit cyniquement manipulateur ou victime lui-même d’un manipulateur.

© La Souris Déchaînée 14/2/2003

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